Appelez-moiDieu

    « Vous permettez que je vous appelle Dieu… »

    D’habitude le Dr. G n’aime pas le rôle de porte-parole… mais il s’y est lancé tantôt et s’étonnait un matin au Staff pédiatrique, au nom des sages-femmes présentes à un accouchement : Un enfant, qui certes a ultérieurement très mal évolué, mais qui avait quand même séjourné préalablement 24 heures en pouponnière, a été considéré par nos amis pédiatres comme « né en état de mort » apparente.

    « Mais il a crié à la naissance paraît-il !! »

    Le Dr G a été renvoyé rapidement dans les cordes d’un crochet du gauche néonatologiste:

    « Qu’est ce que tu crois ça arrive souvent qu’on récupère des enfants que vous trouvez bien sur le ventre de leur mère et que nous considérons en état de mort apparente sur notre table, on les ventile un peu et ils repartent tout de suite… vous ne vous en rendez même pas compte…. »

    Ça rappelle au Dr G l’histoire de cette patiente qu’il interrogeait sur ses antécédents et qui répondait « oh oui, j’ai eu des problèmes, je suis née morte »… Dans les îles, on les appelle des zombies…mais à certains égards l’Alsace se considère aussi un peu comme une île…

    Ainsi on pourrait également attribuer aux pédiatres la vieille devinette classiquement appliquée aux chirurgiens de ce qui les différencie  de Dieu : « Dieu lui ne se prend pas pour un chirurgien (pédiatre)….. »

    Appelez-moi Dieu

    Le Dr G ruminait cette histoire quand quelques jours après, il voit une de ses anciennes patientes avec un grand gaillard assis dans la salle d’attente :

    « Mon fils… c’est lui qui me ramène en voiture, j’ai toujours pas le permis, dit-elle, Vous vous rappelez, heureusement que vous étiez là en 1986 quand vous êtes passé dans la salle d’accouchement et que vous avez appelé immédiatement la sage-femme en disant  « souffrance fœtale », et on est parti tout de suite faire la césarienne…. Sinon je ne sais pas comment il serait aujourd’hui !!

    Le Dr G resta dubitatif jusqu’à ce qu’il comprenne que l’air absent du grand garçon affaissé sur sa chaise et ses oscillations de prière tibétaine n’étaient pas dus aux séquelles de sa souffrances mais aux minimes pastilles de son « mp3 » enfoncées dans ses conduits auditifs.

    Cette histoire finalement ne fit guère plaisir au Dr G qui se rappela qu’en 1986 le service faisait 9 % (peut être 10%) de césariennes et maintenant 19 voire 20% au fil de la sophistication des moyens de surveillance et de leur interprétation de plus en plus scientifique et toujours autant d’ IMC au final…. A moins, bon sang mais c’est bien sûr, que l’on ne considère qu’il y ait de moins en moins de séquelles par césarienne pratiquée, dans quel cas il faudrait faire 100% de césarienne pour avoir les meilleurs résultats :  Jules Romain nous avait déjà mis sur la voie : augmenter ses risques d’être malade c’est finalement augmenter ses chances d’être guéri et il vaut bien mieux vivre malade pour vivre guéri…

    Pour paraphraser Simon de Montfort (« tuez les tous Dieu reconnaîtra les Siens » sac de Béziers) osons le :  « tout est grave, nous les sauverons presque tous…. ».

    Enfin nos patientes pourront nous dire : «Docteur, vous permettez que je vous appelle Dieu »